Au vu de l’actualité, le thème de cette nouvelle lettre peut sembler incongru. Mais en y regardant de plus près, la crise sanitaire que nous traversons actuellement et le confinement qui l’accompagne engendreront des tensions. Des tensions personnelles, familiales qui pourraient mener à des réactions négatives.
Dans ma dernière lettre concernant le scandale de la pédophilie, nous nous interrogions sur notre capacité à apporter des solutions préventives. Ceci sera l’objet de la réflexion qui suit. Je n’ai pas la prétention de proposer toutes les solutions mais d’essayer d’apporter modestement ma contribution sur le sujet. Ce ne sont que des pistes.
La pédophilie est un fléau national (et même mondial), c’est donc à l’Etat de prendre en premier lieu toutes les dispositions éducatives et législatives en matière de lutte contre la pédocriminalité. Espérons que cela se fasse et se fasse rapidement.
Par ailleurs, il semble que, dans l’autonomie qui est la leur, chaque institution veuille prendre des mesures préventives : sport, spectacle, Eglise…
En parcourant le sujet sur le web, j’ai trouvé un article du journal Le Télégramme, publié le 11 décembre 2019 : « Six propositions concrètes pour vaincre la pédophilie dans le sport ». Cela pourrait concerner l’ensemble des institutions.
- Automatiser et étendre la vérification des antécédents judiciaires
- Créer une autorité indépendante pour accompagner les victimes
- Renforcer le fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes
- Donner des moyens au suivi socio-judiciaire
- Mieux sensibiliser et prévenir
- Repenser l’interdiction judiciaire d’exercer auprès de mineur
Pour lire l’article du Télégramme : cliquez ici
L’ensemble de ces mesures sont bonnes mais me semblent encore insuffisantes. La prévention est indispensable, l’écoute et le suivi des victimes sont une très bonne chose et les contrôles judiciaires aussi.
Pour ma part, je souhaiterais revenir à la source : au cœur de l’Homme duquel sort le meilleur mais aussi le pire.
Nous faisons tous l’expérience à des degrés divers que nous ne faisons pas toujours le bien que nous voudrions et que nous sommes parfois submergés par des actes que nous ne voudrions pas.
Les auteurs d’agressions sexuelles sur mineurs ne sont pas condamnés parce qu’ils sont pédophiles, mais parce qu’ils sont passés à l’acte.
Le trouble pédophile qui consiste en un imaginaire déviant sur des personnes mineures n’est, en l’état, pas répréhensible, seul le passage à l’acte mérite sanction. Le premier est de l’ordre de l’intime, le second du public et du bien d’autrui.
S’il n’est pas punissable, cet imaginaire au sens large se doit d’être soigné.
D’une manière générale chacun de nous a à veiller sur ses pensées et ses émotions pour en faire le tri, rejeter les mauvaises et s’attacher aux bonnes. En effet, l’acte naît de la pensée et celui-ci est conditionné pour partie par notre consentement.
Nous ne maîtrisons pas toujours la naissance des pensées et des émotions qui diminuent notre capacité à résister pour ne pas passer à l’acte. Mais, sauf mauvaises habitudes, il nous appartient de ne pas y consentir, ni de discuter avec elle et de les rejeter avec force
Pour s’en convaincre il suffit de taper sur le net : « chasser les mauvaises pensées» et vous aurez une multitude d’articles et de réponses.
Il m’a paru intéressant de chercher ce que « pensait » Gandhi sur le sujet. Voyez entre autre ce que j’ai trouvé :
- « Un humain n’est que le produit de ses pensées. Ce qu’il pense, il devient.»
- «Vos croyances engendrent vos pensées, vos pensées engendrent vos paroles, vos paroles engendrent vos gestes, vos gestes engendrent vos habitudes, vos habitudes engendrent vos valeurs et vos valeurs engendrent votre destin.»
Retrouvez d’autres citations de Gandhi : cliquez ici
Dans cette quête, je me suis souvenu du recueil « Les sentences des Pères du désert » de l’abbaye de Solesmes.
Il y est fait référence à la parole d’un Ancien, qui compare les pensées négatives à des souris infestant notre âme.
« Les mauvaises pensées, disait un ancien, sont comme des souris dans une maison. Si on les tue l’une après l’autre au fur et à mesure qu’elles y entrent, tout va bien. Mais si on attend que la maison en soit infestée, on aura toutes les peines du monde à les chasser. Et quand bien même y parviendrait-on, la maison serait dévastée. » – « Qu’elles demeurent, ou pas, en nous, fait partie de notre pouvoir »
Je dois dire que je connais mal ce trouble de la pédophilie, mais il me semble que l’on ne naît pas pédophile de même que l’on ne naît pas alcoolique. Il en résulte donc que nous devenons ce que l’on pense car nos pensées, in fine, engendrent nos actes.
La lutte contre les mauvaises pensées est donc le premier moyen que l’on se doit d’adopter pour vivre sainement, ce qui nous permettra de respecter autrui dans l’intégrité de sa personne et de favoriser le vivre ensemble.
Voilà pour terminer, une sentence des premiers moines d’Égypte (extrait « Les sentences des Pères du désert » de l’abbaye de Solesmes) qui montre à quel combat contre les mauvaises pensées nous sommes invités :
«Un frère interrogea un ancien : « Pourquoi les pensées m’accablent-elles ? Souvent je leur fais des reproches ; elles ne s’éloignent pas, mais restent sur leurs positions. » L’ancien répondit : « Si tu ne leur dis pas énergiquement : « Allez-vous-en loin de moi », elles ne s’en iront pas, car tant qu’elles ont la paix, elles ne s’en vont pas. »
Qui va faire « la promotion » de cette éducation personnelle ?
Courage et force d’âme en cette période singulière et unique.
Bonjour Frère Marie Pâques et tous,
Je me permettrais de rajouter le rôle des éducateurs , et à commencer par les premiers d’entre que sont les parents. En effet, les valeurs qu’ils enseignent, impriment dans l’esprit de leurs enfants durent bien au delà de l’enfance. Ils doivent travailler à décliner le respect et la droiture d’esprit dans toutes leurs composantes. Ils doivent veiller à réellement construire l’application de ces valeurs. L’Etat doit prendre le relais pour tous les aspects de vie sociale, politique et économique.
Merci de nous pousser à réfléchir!
Daniel
Je ne suis pas d’accord avec votre commentaire. Combattre ses pensées négatives c’est les faire vivre au contraire. Être vigilent(e) à elles c’est leur donner beaucoup trop d’importance. Nous ne pouvons pas combattre les pulsions même les plus « bizarres » car elles sont notre humanité, dans le meilleur et le pire.
Par contre nous nous devons repérer les bonnes pensées. Savoir donner du sens à sa vie c’est savoir ne pas se laisser aller au passage à l’acte qui porte atteinte à l’autre. Car en portant atteinte à l’autre je porte atteinte à mon humanité, à l’humanité dans son ensemble.
Je crois qu’il faut savoir, au contraire, « accueillir, » ses « mauvaises » pensées pour les apprivoiser, qu’elles ne nous envahissent pas.
Se dire que nous ne sommes que des humains avec une histoire personnelle, familiale et sociale. Être humble avec soi même, c’est aussi pardonner à l’autre ses démons. Je crois qu’on peut alors dire parler, mettre à jour ses pensées, ce qui nous ronge, sortir de la honte de ses mauvaises pensées par la parole à nous même d’abord et à un autre. Qu’il soit thérapeute, amis…
Cordialement T.BOULDOYRE
L’Eglise remet-elle parfois en question la possibilité de laisser les prêtres se marier? Par nos temps modernes où il y a de moins en moins d’interdits, les hommes d’Eglise sont aussi soumis à ces nombreuses publicités, vu qu’ils vivent une vie ‘moderne’..A moins de s’enfermer dans un couvent. Ayant vécu en Grande Bretagne, où les pasteurs sont mariés.; je n’ai pas trop entendu parler de pédophilie venant de l’Eglise mais doit avouer ne pas y avoir prêter trop attention. Jeanine
Bonjour frère Marie Pâques,
En cette période de Carême nous sommes invités à nous convertir, c’est-à-dire à changer notre regard. Pour cela nous devons nous engager dans le combat spirituel. Il s’agit bien d’un combat entre nos pulsions, nos bas instincts et ce qui est bon et beau. Vous évoquez ici la question de la pédophilie, on pourrait parler de la pureté en général. Il me semble important de souligner le rôle de la prière et de la lecture régulière de la Parole de Dieu pour nous aider et nous donner un cadre pour soutenir le combat. Je soulignerai aussi le recours à la Vierge Marie, symbole de pureté. Le travail de sape du démon ne doit pas être sous estimé
Bonjour cher frère,
Sur le sujet que tu abordes : effectivement on ne nait pas pédophile. On le devient peut-être à cause de certaines frustrations subies par ses parents probablement par un père qui a écrasé, rabaissé ou diminué son fils, qui lui à son tour à besoin d’assouvir ce sentiment de frustration par la domination sur un être plus faible.
Il y a aussi l’instinct animal qui fait que le mâle domine sa femelle par sa force, sa protection, celle-ci dépend de lui et elle devient sa chose.
Dans l’acte sexuel l’homme a toujours cette pulsion de dominateur.
C’est effectivement l’éducation qui devrait soustraire ce sentiment aux garçons.
A commencer par l’éducation donnée par les parents, par les manuels scolaires, par les publicités etc.
Nous avançons pas à pas, de nos jours la parole s’est un peu libérée, les parents aveugles ont pris conscience du phénomène, des personnels enseignants en parlent aux élèves, des personnels éducatifs sont plus à l’écoute, j’espère que les enfants devraient pouvoir dénoncer ces actes plus facilement.
Mais il ne faut pas faire d’amalgame non plus tous les hommes ne sont pas ainsi, seule une minorité est désaxée. Si tout le monde est attentif et s’intéresse un peu plus de son voisin on pourra vivre plus en harmonie, dans le partage et dans la joie.
Merci cher frère pour tes bonnes réflexions.
Bon confinement
Annie
Bonjour Frère Marie Pâques,
J’espère que vous allez bien et que vous vous tenez à l’écart du coronavirus…
Nous vivons des temps déraisonnables, qui nous renvoient aux grandes peurs du Moyen-Age, un moment que je ne pensais pas connaître de mon vivant…
La crise planétaire du Covid-19 place chacun de nous dans une situation exceptionnelle, inédite, bizarre, angoissante, mais aussi dans une posture de questionnement et de curiosité devant les bouleversements que nous observons, et qui sont loin d’être finis.
Toutes les préoccupations et priorités d’hier sont chamboulées… Plus que jamais cette crise sanitaire nous pousse à réfléchir à ce qui est essentiel dans notre vie et nos activités.
C’est pourquoi j’aimerais bien publier sur Consulendo.com* votre point de vue sur cette crise, sur la façon dont elle peut nous conduire à changer nos comportements, nos méthodes, le fonctionnement de l’économie et des entreprises…
Accepteriez-vous de me donner (quand vous en aurez bien sûr le temps) vos commentaires aux questions suivantes:
– Nous sommes pour la plupart d’entre-nous reclus par obligation à domicile. Vous qui avez vécu la vie monastique, quels conseils pouvez-vous donner aux « actifs » qui se voient contraints à cette « assignation à résidence » forcée?
– Vous avez été aussi chef d’entreprise au sein de l’abbaye de Lerins, et vous connaissez bien les entrepreneurs auprès de qui vous donnez des conférences. De nombreux dirigeants de PME, des commerçants, des indépendants, ont été contraints d’arrêter (ou de réduire drastiquement) leur activité, cela signifie une perte de chiffre d’affaires et donc de revenu… Que pouvez leur dire?
– Pour dépasser le contexte actuel et nous projeter dans l’avenir, parlez-nous de votre projet de restauration de l’ermitage de Notre-Dame de Nize dans l’Hérault…
* Vous pourrez aussi reproduire cet échange sur le site des Compagnons du Sens
Je vous remercie par avance de votre retour, mais si vous n’avez pas le temps d’y répondre, je ne vous en voudrai pas. Nous aurons d’autres occasions d’échange.
Dans cette attente, je vous adresse mon cordial salut et tous mes vœux de bonne santé!
Jacques